Le burn out au travail, c'est quoi ?
Depuis quelques années, l’expression « burn out » a envahi presse et littérature. Burn out des cadres, burn out des médecins, burn out des mères de famille, burn out des organisations, burn out de l’économie, burn out des océans. Le concept fut ensuite décliné en « burn in », « bore out », … traduit en « épuisement professionnel », « syndrome d’épuisement », « asthénie psychique », … et souvent confondu avec la dépression. Difficile de s’y retrouver.
Lydie Leonardi
5/8/20246 min read


Concrètement, un burn out, c’est quoi?
Le burn out est un processus de dégradation du rapport subjectif de l’individu à son activité. Pour faire très court, la personne en fait trop pendant trop longtemps sans récupérer suffisamment, et finit par s’épuiser.
Ce processus connaît quatre phases:
La phase d’engagement : la personne est très engagée dans son activité, généralement plus que la moyenne.
La phase de surengagement : suite à un déclencheur (nouveau projet, nouvelle position, changement d’organisation, …) le travail prend toute la place sur la vie personnelle.
La phase de résistance : la personne nie son surmenage, pense et dit qu’elle y arrivera, s’acharne.
La phase d’effondrement : cette phase peut être progressive ou brutale. L’estime de soi est anéantie, la personne est dans l’incapacité de se concentrer, de travailler, le cerveau et parfois le corps patinent, la machine ne répond plus. Les symptômes sont émotionnels, physiques, cognitifs, comportementaux et motivationnels.
En termes de symptômes, le burn out peut se traduire de mille manières. Fatigue passagère, lente dépression, AVC, accident cardio-vasculaire, décompensation soudaine…
Du point de vue strictement médical, il est vrai que le burnout produit une valse hormonale frénétique avec (entre autre) l’hyper sécrétion de cortisol qui endommage les neurones de l’hippocampe (zone responsable de la mémoire et de la concentration) et du cortex préfrontal (prévoyance et prévision de changement, planning et prise de décisions), sans oublier les conséquences sur la digestion et le système immunitaire, le pancréas et le foie.
Le burn out, c’est comme une dépression?
Le burn out n’est pas une dépression. L’origine n’est pas la même. Illustrons la différence par une image : le burn out est à la neige sur le toit ce que la dépression est aux termites. Soumise à une pression extérieure excessive, la structure intérieure de l’individu, sa charpente psychique, ne résiste pas et s’effondre, comme une maison sous la pression d’un excès de neige sur le toit. La dépression ressemble plus à l’effet des termites : la charpente s’effondre également, mais à cause d’un problème intérieur. On confond souvent la dépression avec le burn out. En effet, dans les deux cas la structure psychique de l’individu est atteinte. La grande différence, c’est que dans la dépression, la rupture de la charpente n’est pas due à une pression extérieure, mais à une cause intérieure. Un mal qui ronge la structure de l’intérieur, et finit par ne plus permettre à l’individu de résister à une pression normale. Le champ n’est pas le même. Une personne qui vit une dépression sera généralement déprimée dans l’ensemble de ses champs d’activité, alors qu’une personne qui traverse le burn out sera surtout en difficulté dans le champ professionnel. Elle conserve le goût pour les activités privées. Le mouvement est inverse. Le burn out est les résultat d’un déséquilibre physiologique qui a des répercussions psychologiques. C’est l’inverse dans le cas de la dépression.
Quelles sont les causes du burn out?
Prenons une autre image pour illustrer ce qui peut entraîner un burn out. Considérons que nous possédons un réservoir d’énergie. Les activités de notre quotidien nous prennent de l’énergie ou nous en donnent, et ce rapport est unique à chacun. Dans notre quotidien, nous essayerons donc de conserver un équilibre entre les activités qui nous prennent de l’énergie et celles qui nous en procurent. Le burn out est une situation d’épuisement de l’individu, entraînée par un déséquilibre entre ses dépenses et ses apports d’énergie. Lorsque nous vidons nos réservoirs plus vite que nous les remplissons, un jour nous tombons à court d’énergie, nous nous effondrons sur nous-mêmes, c’est le burn out. Littéralement, en anglais, « consumé ». Pour aller plus loin, considérons que ce réservoir est fait en réalité de quatre compartiments. Les réservoirs d’énergie physique, mentale, émotionnelle, et spirituelle. Il est probablement sage d’être en équilibre dans nos dépenses et apports de chacun de ces réservoirs. Si par exemple nous sommes en pleine forme physique, mais épuisés émotionellement par une situation de conflit, nous ne sommes pas en équilibre intérieur pour travailler sereinement.
Un exemple de burn out?
La pression extérieure, l’équilibre entre les dépenses et les apports d’énergie sont des approches d’explication du burn out. Prenons quelques exemples de situations réelles qui sont typiquement génératrices de burn out. Prenons le cas d’une infirmière qui rêvait d’apporter de la présence humaine aux personnes en souffrance, et qui dix ans plus tard se retrouve dans un service à courir en permanence, noyée sous des aspects administratifs et sous la pression des chiffres. Il lui est par exemple demandé de faire les piqûres en moins de 7 minutes, pour une question de rentabilité. Elle n’a donc plus le temps de mettre le patient en confiance, de laisser sa main prendre la température du corps à toucher, … on n’a pas le temps. Son travail a perdu tout son sens : ce qui lui donnait de l’énergie dans son travail a totalement disparu, il ne reste plus que les aspects pénibles et la pression de temps, qu’elle avait acceptés lorsqu’ils étaient contrebalancés par les joies. Peu à peu son métier sans âme l’épuise. Un dernier exemple peut être celui d’un gérant de magasin au sein d’un petit réseau d’épiceries. L’ambiance y est chaleureuse et familiale, le lien au client est direct et apprécié. Un jour, le réseau est racheté par un grand groupe de distribution. Un sous-directeur est envoyé depuis le siège, pour gérer la transformation du magasin, le changement de culture, et les éventuels changements d’équipe. Les services sont standardisés, plus question de personnaliser le rapport au client. Pour augmenter la rentabilité, certains services sont supprimés. Le gérant freine ce changement autant qu’il peut, se sentant légitime dans sa gestion précédente, validée par la bonne relation qu’il possédait avec ses clients. Rongé par ce changement qui va contre ses valeurs, coincé entre sa hiérarchie, son nouveau sous-directeur, et le personnel, il s’épuise. Un beau matin, il n’arrive plus à se lever. Son corps ne répond plus, il est épuisé. C’est le burn out.
Le burn out, à qui la faute?
Au vu des exemples ci-dessus, on pourrait facilement conclure que la responsabilité du burn out incombe à l’entreprise. Ce serait un mauvais raccourci. L’académie de médecine, dans son rapport publié en février 2016, dit avec sagesse du burn out qu’il est « le résultat de la rencontre entre un individu et une situation ». En effet, deux collègues face à la même situation ne vont pas réagir de la même façon. En fonction de notre éducation, de notre capacité à prendre du recul, de notre sens du devoir, de nos sources d’énergie hors travail (famille, sport, autres engagements,…), nous réagirons différemment aux mêmes situations. Certains s’adapteront facilement, d’autres s’opposeront, d’autres encore se tairont, … Certains vont même eux-mêmes créer la situation de leur propre burn out. Nous avons parfois le désir de nous auto-investir de missions de sauvetage de personnes, de situations, d’organisations. Aider ceux qui ne demandent pas d’aide, proposer des idées de changement ou de projets à notre hiérarchie qui n’en attend pas, … nous investir corps et âme dans des missions de lutte contre le monde entier, sans que personne ne nous l’ait demandé. Si le rapport de poids entre la responsabilité de l’individu et celle de l’environnement professionnel peut varier (50/50, 10/90, 100/0, …), les statistiques montrent que l’environnement professionnel est majoritairement la cause principale. Charge de travail excessive, pression chronique du temps, conflits, procédures abusives, … si le travail n’a pas vocation à contenir en lui-même des espaces de récupération de fatigue physique, peut-être devrait-il en être autrement de la fatigue psychique? S’il est normal de rentrer fatigué physiquement chez soi le soir, l’est-il autant de quitter le travail dans un état d’épuisement psychique? Peut-être n’est-il pas malsain de considérer que si l’entreprise est un appareil économique au service d’une cause de production, elle est également une communauté d’individus au service de cette cause. Cette communauté d’individus a peut-être aujourd’hui à repenser sa valeur du collectif, sa capacité à protéger ses membres, à réintroduire des valeurs de bienveillance et de compassion?
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